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Moussa Diaby, de l'Espérance Paris 19e à l'équipe de France

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À 22 ans, Moussa Diaby n’a porté les maillots que de quatre clubs, depuis qu’il a découvert le football. Celui du Bayer Leverkusen, qu’il revêt depuis 2019, celui du Paris Saint-Germain, où il a signé son premier contrat professionnel, celui du FC Crotone, avec lequel il a effectué ses débuts en pro, et enfin, celui de l’Espérance Paris 19e, le club qui l’a vu débuter en poussins et auquel il est resté fidèle jusqu’aux U14. À première vue, un club de quartier comme il en existe tant d’autres, à ceci près qu’il est niché au cœur d’une véritable pépinière de talents, au nord-est de Paris, à la frontière de la Seine-Saint-Denis. Dans ses rangs, en plus du néo international français, sont notamment passés Lossémy Karaboué (ex-ASNL), Abdoulaye Meïté (ex-OM), Eric Tié Bi (ex-ETG), Hérold Goulon (ex-MUC 72), Ismaël Traoré (SCO), Antoine Bernede (RB Salzbourg), Nicolas Pépé (Arsenal), Georges-Kévin Nkoudou (Beşiktaş), Evan Ndicka (Eintracht) ou encore Mamadou Kanouté qui vient de signer son premier contrat pro avec Strasbourg. Excusez du peu. Cette liste, c’est Morade Djeddi qui la récite, en s’excusant d’oublier des noms.

À 44 ans, l’homme partage son temps entre son emploi de professeur de mathématiques au lycée, et son activité de président de l’Espérance, dont il retrace l’histoire. « Moustapha Guerache a fondé le club en 1974, dans le but de créer un endroit où les enfants d’immigrés pourraient jouer au foot. Il avait officiellement appelé ça Club Omnisports Espérance, mais sur les maillots, il était inscrit Espérance Arabe avec une sourate du Coran. Je ne sais pas si ce serait bien vu aujourd’hui » , sourit Djeddi avant de reprendre : « Ce qui est sûr, c’est que cela a attiré beaucoup de gens qui voulaient jouer pour cette équipe grâce à son nom. »

Crackheads, Furiani et philharmonie

À mesure que le président conte l’aventure de son club, il offre la visite de ce quartier qui a vu grandir tant de talents. À quelques pas de la station de métro Riquet, il s’engouffre dans le quartier des Orgues de Flandre dans lequel le bâtiment qui a vu grandir l’actuel Monégasque Youssouf Fofana fait face à celui qu’a occupé Amine Harit durant son enfance. Le city-stade coincé entre les immeubles a été refait il y a quelques années, mais son revêtement tire déjà la tronche. Moussa Diaby y a bien effectué quelques crochets dévastateurs, mais son talent l’a vite amené à pratiquer son art sur des terrains homologués.

Le city-stade de la cité des Orgues de Flandre.

Quelques centaines de mètres plus loin, nous voilà rue du Maroc, où la famille Diaby a grandi. Un endroit gangrené depuis peu par les toxicomanes, qui errent comme un peu partout aux alentours. « Il y en a de plus en plus depuis l’arrivée de la Covid, souffle Morade Djeddi, désormais au volant de sa Clio. Beaucoup de migrants bloqués en France ont fini par tomber dans le crack. La nuit, c’est Walking Dead. Avant, ils restaient à Stalingrad, mais ils se sont déplacés jusqu’ici parce que c’est commerçant et qu’ils peuvent faire la manche. »

Rue du Maroc, où a grandi Moussa

Le temps d’avaler 4 petits kilomètres, et nous voici au centre sportif Jules-Ladoumègue, l’antre de l’Espérance Paris 19e. Là où Moussa Diaby a tapé ses premiers ballons, même si l’endroit a changé. À l’ombre de la Philharmonie de Paris, dans laquelle Morade avoue « n’avoir jamais mis les pieds, tu crois qu’ils auraient invité les gamins du quartier ? » , si le terrain principal est toujours là, les terrains annexes ont disparu ou ont été déplacés, comme c’est le cas du fameux « Furiani » , surnommé ainsi tant il était difficile pour les visiteurs de s’y imposer. À la place, on y trouve des terrains de tennis et un de rugby, « un sport qui n’intéresse personne ici » , se lamente Morade, toujours en quête d’espaces pour faire jouer ses nombreux licenciés.

Stade Jules Ladoumègue, bastion de l’Espérance

L’humble Moussa

« Le football, pour moi, c’est un don. Messi n’a pas travaillé son dribble, il est né avec. Moussa, c’est pareil. Ses aptitudes, il les a depuis tout petit. » C’est aussi simplement que Morade entame le chapitre du Diaby enfant. « Petit, il était déjà percutant, hargneux, adroit… enfin, il était au-dessus, quoi. On se fichait de sa petite taille, on le surclassait quand même, surtout pour les matchs de coupe. » Et des coupes, Moussa Diaby va en remporter quelques-unes avec ses potes Youssouf Fofana et Yahia Fofana (aujourd’hui gardien du Havre), qui évoluent dans son équipe.

Avec Yahia et Youssouf Fofana

« Quatre buts, quatre face-à-face conclus de quatre manières différentes ! Moussa, c’était ça. Et quand je le vois jouer à Leverkusen, c’est le même qu’à l’Espérance. » Morade Djeddi

Morade Djeddi se souvient particulièrement de cette finale de Seine-Saint-Denis disputée au Stade de France en 2010, face au FC Solitaires, autre club du 19e avec lequel l’Espérance partage ses terrains. « À la mi-temps, on est menés 4-1. On a fini par l’emporter 6-5, grâce à un quadruplé de Moussa et un doublé de Youssouf. Qu’est-ce que j’étais fier ! J’ai dû regarder la vidéo du résumé 300 fois. Je suis enseignant, je l’ai projetée à mes élèves. Quatre buts, quatre face-à-face conclus de quatre manières différentes ! Moussa, c’était ça. Et quand je le vois jouer à Leverkusen, c’est le même qu’à l’Espérance. Il aime profondément le football. Il pouvait jouer le samedi matin avec sa catégorie d’âge, puis être surclassé et jouer l’après-midi. Et le lendemain, il me passait un coup de fil pour savoir où j’allais jouer avec les U19 et je le mettais dans le minibus pour aller par exemple à Clichy-sous-Bois. Et il regardait le match à côté de moi, sur le banc. »

Losseni Sy, l’éducateur qui a eu Moussa Diaby dans ses équipes durant tout son passage à l’Espérance, abonde : « C’était un gamin insouciant qui n’aimait que le foot. Mais surtout, c’était déjà quelqu’un d’humble par nature. » Un trait de caractère confirmé par Djeddi, qui se souvient de la signature de son premier contrat pro au PSG, à laquelle le joueur l’avait invité : « Il était face à Leonardo avec son téléphone tout cassé. Il n’est pas matérialiste du tout, et toujours disponible. Il est resté proche du club, il a toujours un petit mot, alors que ça devient compliqué lorsque tu gagnes beaucoup d’argent de garder les pieds sur terre. Pendant ses vacances, il se balade de temps en temps autour du stade avec son bébé dans la poussette, il fait des photos avec les gamins. Mes U12 sont déjà plus grands que lui. C’est un homme qui bénéficie d’une belle éducation, de belles valeurs. Il n’a jamais été dans les histoires du quartier, mais il y est très apprécié grâce à son humilité. Il est parrain des opérations de fournitures scolaires, de tournois de foot… Il répond toujours présent quand on a besoin de lui. » Cela tombe bien : il paraît que ce soir à Lyon, c’est une équipe championne du monde qui aura besoin qu’il réponde présent.

Par Mathias Edwards et Gad Messika
Photos : ME et collection privée de Morade Djeddi

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